Étude 1999

Étude d’opportunité relative à la traversée de la rivière Saguenay entre Baie-Sainte-Catherine et Tadoussac

Annexe EA 

Simulation de pont

Commandée par: le Ministre des Transports du Québec

*étude complète au bas de la page

Les auteurs

  • Le Consortium Naturam-Génivar et le Ministère des Transports du Québec (MTQ) dont l’équipe comprend l’auteur de l’étude de 1995. Naturam est une PME de Baie-Comeau spécialisée en environnement alors que Génivar est une firme de génie-conseil  de Montréal. L’étude fut dirigée par un co-propriétaire de l’entreprise Naturam et le chargé de projet  fut un urbaniste montréalais. comme celle qui a dirigé l’étude interne 1979B préparée par le MTQ.
  • Buckland and Taylor (COWI) ltd, Bridge Engineering: Cette firme, ayant des bureaux au Canada, est reconnue internationalement pour ses compétences en matière de construction de longs ponts suspendus. Aujourd’hui même, ils achèvent la supervision de la construction de 2 ponts d’intérêt : Le pont de Izmit en Turquie qui fut mis en service en juin 2016 ; le 3ième plus long pont suspendu au monde et le pont Halogalandbrua à Narvik en Norvège qui est à la fine pointe des nouvelles technologies et permet de construire un tablier à 3 voies pour un pont de 1150 mètres. Nous reviendrons sur ce pont de Narvik dans l’étude de 2015B.

Structure

Les experts et le MTQ proposent un projet s’étendant sur 4 kilomètres composé au sud d’un tunnel de 1.2km suivi du pont suspendu de 1740m de portée totale et d’un viaduc de 950m (E4, E5E14E15). Le tracé du projet s’apparente à celui proposé dans l’étude 1979B préparée dans l’étude interne du MTQ (B5). Le coût du projet complet incluant les routes d’accès s’élève à 371M$ (1999) alors que le coût du pont suspendu s’élève à 253M$ (1999)

Principales observations sur le plan technique

Voir la correspondance et l’analyse sommaire de l’architecte Pierre Brisset qui s'intéressait déjà depuis près de vingt ans au dossier du pont à Tadoussac. (E28 à E41)

Les études antérieures de 1979A et de 1986 recommandaient de construire un pont à la Boule, en amont des lignes électriques d’Hydro-Québec soit sur le tracé P1 (E4)

Or le MTQ a fait contredire ce choix dans l’étude 1979B  en proposant plutôt un pont à proximité des traversiers, soit le tracé P4 (E4) même si les ingénieurs avaient écarté antérieurement ce tracé parce que trop coûteux.

Le MTQ surévalue le coût des routes d’approche en y incorporant sans justification 6.5 kilomètres de tunnel sur une route à 4 voies qui rejoint un pont autoroutier à 4 voies. Ces tunnels sont injustifiés.

De plus, une erreur de calcul surévalue le pont à La Boule de 60M$ (1999). En effet on a confondu le prix du pont de l’option P3 de portée centrale de 1360 mètres pour 234M$ (1999) avec le pont de l’option P1 qui lui a une portée centrale de 1150 mètres.

Le prix du pont de l’option optimale aurait dû se lire 174M$ (1999) (Voir annexe E5)

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Par ces deux anomalies, le coût du pont en P1 fut gonflé de 300% soit  plus de 500M$ (1999)

Suite à ces résultats, on a écarté l’option optimale à la Boule. Le MTQ et le consortium ont transmis aux experts B&T/COWI des documents pour préparer et évaluer une projet de pont près des traversiers. Ces documents comprenaient 3 études antérieures (E3), soit:

  1. celle que le MTQ a faite en catimini en 1979 (1979B) dans laquelle, contre l’avis des ingénieurs, le MTQ décide de présenter un projet à proximité des traversiers , en terrain très accidenté ; terrain qui nécessitera la construction de 4 kilomètres d’infrastructures massives (E9) et les 2 études préparées par des ingénieurs de
  2. LGL (1979A) et de
  3. l’étude Brisset et al. (1986) qui recommandent un pont au site de La Boule.

Parmi ces documents, le Ministère demande  à B&T/COWI de préparer un projet de pont sur 3 tracés (P3, P4, P5) (E3), sachant que les tracés P3 et P5 étaient irréalisables, P3 étant en terrain escarpé et infranchissable à un coût abordable et P5 nécessitant un passage en plein cœur du village de Tadoussac. Le prix du projet sur le tracé optimal P1 a donc été gonflé par des tunnels injustifiés, une autoroute à 4 voies sur une route nationale à 2 voies  et une erreur de calcul. (E7)

Les ingénieurs de B&T/COWi  présentent un projet de pont abordable (253M$ (1999) (E46 à E48) dans un projet global de 4 km de long  à 371M$(1999) soit : un tunnel de 1.2 km , un pont de 1760 mètres et un viaduc de 950 mètres. L’étude d’impact de 2009 éliminera le  tunnel en rive sud à la demande du MTQ, présentera un pont suspendu plus court (1350m de portée centrale au lieu de 1420 dans l’étude présente (Option P4 de l’annexe E5), et pourtant fera passer le coût du pont seulement de 253M$ (1999) (annexe E5 option P4) à 712M$ (2004) (F11) même si l’option de pont 2009 présente une portée centrale réduite de 70 mètres (1350m versus 1420m en 1999).

Les ingénieurs du MTQ et Genivar ont exigé de COWI de préparer un projet de pont ayant un tablier situé à 88 mètres au-dessus de l’eau. Cette exigence engendrait des coûts élevés et B&T/COWI, dans son rapport, fera une recommandation claire :

« The lowering of the vertical profile should be viewed as a strong opportunity to reduce the crossing costs since the 88 metre height of deck above water appears excessive in comparison to typical navigational clearances prescribed elsewhere » (E13)

La hauteur du tablier est excessive et pourtant, dans l’étude d’impact de 2009, le MTQ exigera du consortium SNC-Lavalin/Génivar d’éliminer le tunnel de 1.2km en rive sud et donc de monter le tablier du pont au-dessus de la montagne, à 140 mètres de hauteur, propulsant du coup le prix du pont. (F29)f29

L’étude confond la longueur du pont sur le tracé P1 à La Boule et son coût avec celui du tracé P3. On indique en P1 un pont de 1,150 mètres de portée centrale d’un coût de 218M$ (1999) alors qu’en page 220 (E15) en P1, on présente un pont de 1220 mètres de portée centrale et en page 219, on indique un coût du pont de 234M$ (E5).Enfin on présente le pont en P3 de 1,360 mètres de portée centrale au coût de 234M$(1999) . En utilisant les paramètres utilisés pour le coûts des autres tracés, on obtient une coût corrigé pour P1 de 174M$ (1999) (E6). Le MTQ a évalué dans l'étude 1998, le coûts du pont en P1 sur l'axe D à 218M$ (1998) et en 1999 on a évalué le pont de 1150 mètres (Option DD) à 115M$ montant qu'on a ajusté à l'inflation dans l'étude 1999 à...218M$ (1999) (E7E8).

Principales observations sur les plans socio-économiques et environnementaux

Une analyse avantage-coût est présentée (E12) dans laquelle on note plusieurs lacunes.

  1. On n’y trouve pas les coûts d’immobilisation des traversiers
  2. On n’y trouve pas les coûts de radoubs de demi-vie que les traversiers doivent subir après 20 ans d’opération,
  3. On impute la totalité du coût du pont la première année alors que celui-ci sera construit progressivement sur 4 ou 5 ans.
  4. On indique que le taux d’actualisation utilisé sera de 5% (E18) alors que dans le scénario de référence on utilise un taux de 8% (E12). Ces taux sont anormalement flexibles surtout lorsque l'on sait qu'ils s'appliquent en dollars constants c'est à dire que l'inflation est exclue de ce paramètre:

1973:    2.7% (I4), MTQ lettre de l'ingénieur C. Hamelin.

1999:    8% (E12) Consortium Naturam/Génivar, Pont Tadoussac

2009:    5% (F7.15, F7.16) Consortium SNC-Lavalin/Génivar, Pont Tadoussac

2011:     3.3% (F54) Transport Canada, MTQ, Consortium BCDE, Pont Champlain

2015:     2.6% (G44, G45) Transport Canada, Consortium SSL, Pont Champlain

On remarquera à l'annexe F7.16 l'impact que ce seul paramètre peut avoir sur le résultat de l'analyse avantages-coûts, soit la Valeur actuelle nette (VAN).

  1. On ne considère pas la sécurité routière comme un enjeu (E17). On élimine donc les coûts reliés à la sécurité routière (E10E17), on considère que le nombre et la gravité des accidents ne sont pas un enjeu à la traverse de Tadoussac ; ce que le coroner Dr Arnaud Samson contredira en 2001 en faisant la description du Syndrome de la traverse et en identifiant le nombre de décès et de blessés graves et d’accidents qui surviennent sur les routes d’approche vers la traverse. (Voir Syndrome de la traverse Dr Arnaud Samson.) D’ailleurs en novembre 2005, les recherchiste de l’émission JE du réseau TVA démontraient que la route 138 entre Québec et Sept-Îles est la route la plus meurtrière au Québec et que les secteurs d’approche au traversiers y sont particulièrement dangereux.  Le MTQ reconnaîtra dans l’étude 2009 que 30% des décès, blessés et accidents survenant sur les routes d’approche du traversiers peuvent être imputable à la traverse elle-même.

Des paradigmes urbains à repenser pour les projets hors des villes

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Plusieurs paradigmes utilisés par les urbanistes et économistes urbains ne s'appliquent pas en région. Si on s'en tenait à ces paradigmes, seul Montréal subsisterait comme centre habité dans la province. En effet, on évalue la pertinence d'une route par la population qu'elle dessert plutôt que par le besoin d'accéder au territoire québécois. Ainsi, là ou il y a un million de personnes, tous les projets sont permis et encouragés selon les paramètres utilisés dans cette étude. En contrepartie, si 100 000 personnes maintiennent une activité économique sur un territoire aussi vaste que la Norvège, il n'est pas justifié, selon les paramètres proposés, d'y maintenir ou d'achever une route le desservir et encourager son essor. Cette approche historique de répulsion envers notre propre territoire pourrait expliquer la cession du territoire du Labrador à la province voisine  et la désintégration de toutes les régions qui ne sont pas en périphérie de la métropole. Voici quelques paradigmes qui devraient être revus.

Paradigme 1

Le désenclavement de la région sera inutile

mapQCDans cette étude, comme dans celle de 2009, les auteurs refusent de considérer les bienfaits du désenclavement de la région sur l’économie régionale : le tourisme, la transformation des matières premières, le maintien des entreprises existantes et l’installation de nouvelles, sous prétexte que seul le temps perdu  a une valeur économique. L’urbaniste (un mot dont l’origine latine signifie qui s’intéresse à la ville) chargé de projet considère que la problématique à Tadoussac doit être considérée avec le même regard qu’une problématique de circulation montréalaise : en conséquence, les retombées d’un pont et le désenclavement de la région ne doivent pas être considérés. Une révision des retombées de l’ouverture du pont Laviolette à Trois-Rivières démontre bien pourtant  l’effet pont, aussi bien que l’ouverture du pont Pierre Laporte entre autres. Un accès routier fluide et sécuritaire est une prémisse incontournable à la diversification d’une économie régionale et à son essor.Que serait l'économie montréalaise si on n'avait pas construit des dizaines de ponts pour rejoindre l'île.  L’étude refuse de considérer cette évidence (E17).

Pourtant depuis des décennies, l’importance du désenclavement est reconnu internationalement.

Le sens de désenclavement a été défini par le géographe français Jean Labasse comme étant: « les tentatives cohérentes entreprises par les pouvoirs publics pour rompre l’isolement matériel et moral de zones vouées autrement à la stagnation économique ou à la sécession politique. » L’Organisation de l’Espace. Paris, Herman, 1966.

En milieu éloigné, lorsqu’une seule route nationale dessert une région dont le territoire équivaut à celui de la Norvège, lorsque cette route est la seule route nationale qui dessert l’est canadien, soit la Côte-Nord et le Labrador ; un territoire aussi vaste que la France, lorsque cette route se termine en cul de sac à ses deux extrémités : Tadoussac et Kégaska , achever cette route par un pont et ouvrir le territoire vers l’est  représente un impact économique majeur et déterminant pour l’avenir de la région et pour le Québec. Un Québec qui néglige depuis des décennies son marché primaire, là où il pourrait avoir une influence déterminante, oublie ce qui fait une grande nation : sa capacité à échanger et à commercer autour d’elle. Cette évidence n’a pas été perceptible aux yeux des urbanistes possiblement  parce qu’il n’y a pas de centre de haut savoir ou d'université dans la région Côte-Nord pour transmettre ces réalités. De surcroît, malgré leur méconnaissance du milieu nord-côtier on sollicite l’expertise d’urbanistes et d’économistes du centre. Rappelons que selon un sondage, 70% des québécois ne sont jamais venus en Côte-Nord. (Sondage de Léger Marketing, commandé par la CRÉ Côte-Nord en 2005)

Paradigme 2

Mettre tous ses œufs dans le même panier

(Étude Higgins, Martin, Raynaud 1970)

oeufsLes experts urbains formés dans les universités métropolitaines ou américaines font la promotion  du modèle américain de développement territoriale. Ce modèle dans lequel les grandes villes de plus d’un million d’habitants , par exemple,  concentrent l’activité économique alors que les régions avoisinantes fournissent des consommateurs et des biens à la ville centrale. Aux USA, ce modèle s’applique assez bien puisque des centres urbains de plus d’un million de personnes sont dispersés sur tout le territoire, créant ainsi une compétition naturelle entre ceux-ci et rapprochant généralement les régions des villes centrales. Au Québec, l’application de ce modèle américain  est une erreur. Depuis les années 70, on tente d’appliquer ce modèle au Québec et les résultats sont alarmants. Les grandes distances entre les régions et le centre décentré dans l’extrême sud-ouest du territoire rendent ce modèle  destructeur de richesse. En s’acharnant à l’appliquer, le gouvernement accentue la désintégration de ses régions périphériques et affaiblit son centre. En 1970, Montréal était considéré la métropole canadienne. Depuis, en intégrant au modèle québécois les suggestions des économistes Higgins, Martin et Raynaud de concentrer les investissements structurants dans la métropole et  ses environs. En corollaire , ils proposaient de limiter les investissements structurants en région et de se limiter aux investissements industriels , entendre rentables pour le centre. Montréal devait devenir une locomotive économique à laquelle les régions s’empresseraient de s’attacher dès qu’elle quitterait la gare.

En réalité, force est de reconnaître que, depuis 40 ans,  la locomotive n’a jamais quitté la gare et que les wagons des régions périphériques se sont détériorés faute des investissements nécessaires pour assurer au moins leur maintien. Montréal pendant ce temps a perdu son statut de métropole canadienne pour devenir une ville provinciale  autour de laquelle s’agglutine sur un mince territoire plus de 90% des québécois.

Un regard sur le haut de l’organigramme du Ministère des Transport indique l’omniprésence de Montréal  (E24) dans les hautes fonctions  du Ministère.

Si aujourd’hui, le milieu politique affirme que cette concentration des investissements des premières versions du modèle québécois n’est plus appliquée, l’organigramme du Ministère lui semble être resté figé dans le temps et appliquer intégralement les préceptes de l’étude HMR 70. Un des auteurs de cette étude est d’ailleurs un expert auquel le MTQ se réfère en matière d’analyse avantage-coûts.(F49, F50, F71 à F73). En occurence, à la lumière des faiblesses, embûches et abus dans les analyses avantages-coûts de cette étude et de celle de 2009, on peut se surprendre que le Ministère utilise comme document de référence un travail de cet auteur intitulé: Faiblesses,Embûches et abus dans les analyses avantages-coûts (Université de Montréal, 1993) (F73). Les nombreux biais répertoriés pour saboter le projet de pont sont-ils liés aux manipulateurs de savoir?

Dans une telle trajectoire déstructurant son territoire, le Québec pourrait devoir accepter le changement ou la disparition de son territoire qui pourrait être cédé aux peuples qui l'utilisent historiquement. Ceux-ci, par les redevances sur les ressources qu'ils récolteraient, seraient en mesure d'en maintenir l'occupation et de le développer.

L’analyse avantage coûts

Des paramètres à géométrie variable

digital-marketing-1563467_640Nos observations nous indiquent que les paramètres utilisées dans ces analyses sont très « flexibles » selon qu’un projet concerne le centre ou la région (Taux actualisation ; Pont Champlain 2011 à 3.3% versus le taux d’actualisation dans l’étude d’impact 2009 de 5% (F54)). Parmi d'autres paramètres non-appropriés , on peut noter la valeur de la vie humaine, l’exclusion des impacts économiques, l’analyse des projets régionaux en fonction de la tendance de  l’achalandage sans considérer les limites dues à la saturation du service de traversiers ou l'importance du territoire à desservir. En l'occurence la Côte-Nord est un fer de lance du Plan Nord et la seule route nationale disponible pour y accéder impose  un service de bateaux passeurs à l'entrée même de la région (E49). En Côte-Nord, seulement maintenir l’état des routes existantes représente un défi de tous les instants. Le MTQ considère que de construire un pont pour traverser la rivière Saguenay pourrait empêcher l’entretien et l’amélioration de la route 138 (D3) alors que la réallocation des fonds actuellement versés à la Société des Traversiers permettrait précisément de libérer des fonds pour améliorer et achever la route 138.

Un modèle québécois déstructurant

En appliquant cette approche nord américaine au Québec, on a fait fi des réalités géographiques. Le Québec est isolé dans l’extrême nord-est du continent ; une seule ville importante : Montréal, après des décennies de politiques centralisatrices, a accumulé l’essentiel de la richesse de la province et conséquemment, le panier où ont été déposés tous nos œufs s’est percé et une partie non négligeable de la richesse collective se perd sans doute encore dans les mains de groupes recherchant leur intérêt propre comme l’a démontré en partie la Commission Charbonneau.

Le modèle québécois et le transport aérien, même modèle aliénant

Ce modèle nord-américain est aussi celui qui est appliqué dans le domaine du transport aérien avec le système de desserte aérienne en étoile (Hub and spokes) par lequel les voyageurs des régions doivent se présenter dans un aéroport central avant de pouvoir prendre un vol international. Au Québec, le centre de la population est localisé dans l'anti-centre qu'est l’extrême sud-ouest de la province, rendant le modèle de desserte à l’américaine encore inadapté, créant des marchés captifs auxquels le transporteur national, depuis la fin des années 80, impose des tarifs  élevés pour lui permettre d’être plus concurrentiel sur les lignes internationales. Le gouvernement du Québec souhaite organiser bientôt un autre colloque sur la concurrence et les tarifs dans le  transport aérien vers les régions périphériques du Québec.  Le transport aérien est de juridiction fédérale et  Montréal ne permettra pas que l’on fasse des pressions sur le transporteur national pour qu’il quitte les régions devenues exsangues en matière de service faute de tarifs raisonnables. L’épée de Damoclès, suspendue en permanence depuis des décennies au-dessus de la tête de la ville, soit la menace du départ du siège social du transporteur national vers Toronto, empêche le gouvernement du Québec de favoriser l’émergence de transporteurs compétitifs dédiés à la clientèle des régions.

La seule proposition acceptable pour le gouvernement du Québec serait à nouveau de conforter le transporteur national en lui assurant le maintien de ses marchés captifs par l’injection de l’argent des contribuables pour le financer et l’encourager ainsi à perpétuer le modèle aliénant actuel. L’état investit déjà des fonds publics pour les déplacements provenant entre autres de la Basse Côte-Nord. En encourageant l’absence de concurrence le gouvernement créée une situation perdant-perdant-perdant pour les passagers et la clientèle obligée des régions et gagnant-gagnant pour le transporteur national.On fait payer les plus démunis des régions éloignés qui doivent prendre l’avion par obligation, (se faire soigner, éduquer leurs enfants, former la main d’œuvre) pour offrir de meilleur prix aux mieux nantis du centre qui désirent prendre des vacances dans le sud. Cette façon de subventionner le transporteur national accentue les inégalités dans la population québécoise. (E44)

L’exemple du transport aérien s’applique bien à cette attitude du MTQ en matière de développement routier. Tout faire pour éviter les investissements en région sauf pour favoriser des  projets industriels rentables, comme une route vers une mine de diamant par exemple. Pourtant, la désertification humaine du territoire québécois et son maintien en zone de chantiers d’extraction et d’expédition de matières premières, sans accès véritable à la transformation de nos ressources,  nuit à tous les québécois, ceux du centre y compris. (voir site le: www.aviationregionalequebec.com)

Paradigme 3

La tendance de l'achalandage est déterminant

L’achalandage de la route est le principal facteur qui peut déterminer le moment ou un pont devra être construit selon les auteurs (E22). L’usage de ce paradigme par le MTQ fausse la réalité. La route est saturée par la présence des traversiers depuis plus de 40 ans (Voir études 1973 et 1976). Comment alors espérer un accroissement de l’achalandage ?

Les chiffres démontrent que l’achalandage de la route 138 est  limité par les conditions imprévisibles et souvent dangereuses auxquelles les traversiers soumettent les utilisateurs de la route. Or cette limitation ou saturation, encore plus évidente l’été, crée un cercle vicieux dans lequel la région est condamnée à stagner. C’est la logique inversée de l'annonce de saucisses : Plus les traversiers sont saturés, moins il y aura de croissance de l’achalandage et moins il y aura de croissance moins il y aura de pont.

Pourtant l’important est de connaître les vrais coûts totaux des traversiers à Tadoussac et des installations pour les supporter  à terre et dans la capitale et de comparer ceux-ci avec les vrais coûts totaux du pont et de ses approches en considérant les bienfaits et les inconvénients  de ce désenclavement.

Pont ou Traversiers?

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C’est la seule question pertinente ; l'utilisation de la tendance de  l’achalandage d’une route saturée et limitée par le service de traversiers lui-même est illogique.

Tant qu’un lien routier fonctionnel ne sera pas achevé, les fluctuations des prix des matières premières auront aussi un effet direct sur l’achalandage de la route.

En 1973, l’ingénieur Monti a fait l’exercice et démontré qu’un pont était plus avantageux que de maintenir les traversiers. En 2015, La Société du Pont sur le Saguenay a atteint la même conclusion (Voir Étude 2015). Après 43 ans à dépenser des millions pour des études parrainées par le MTQ, études dont la rigueur est trop souvent absente, il est temps de demander à des experts d’évaluer les coûts de ce pont précisément, il est aussi temps de demander à des ingénieurs rigoureux et compétents d’établir les coûts des routes d’approche vers le site optimal connu depuis bientôt 40 ans.

Paradigme 4

La traverse n’empêche pas les déplacements

Les auteurs banalisent les effets dissuasifs et les coûts pour l’industrie régionale des traversiers sur les échanges entre la Côte Nord et le reste du continent. (K19 à K23)

Les observations sur le plan environnemental

  • On évoque la perturbation des habitats des rapaces et des cétacés (E18). Pourtant il est difficile de comprendre comment un pont dérangerait les cétacés plus que les traversiers qui opèrent jour et nuit au cœur de l’estuaire de la rivière, là où historiquement les bélugas se nourrissent (E26). Des études ciblent de plus en plus le bruit des bateaux comme une cause de la disparition des bélugas. En effet, les communications de la mère et du bébé se font par ondes sous-marines, ondes qui sont brouillées  lorsque des bateaux sont à proximité. Le bébé ainsi peut perdre sa mère et mourir d’inanition. Si, comme le gouvernement fédéral vient de l’annoncer, les bélugas sont une espèce en voie de disparition, il importe de prendre les moyens pour les protéger et le maintien de traversiers en permanence dans l’estuaire n’est pas un de ces moyens.
  • La déstructuration urbaine (E18) : Le fait de relier le village de Sacré-Cœur, la principale communauté près de l’estuaire du Saguenay, à la municipalité de Baie-Ste Catherine par un pont permettra d’assurer l’avenir des 3 villages de l’estuaire et de développer une masse critique pour mieux occuper le territoire. Actuellement, un déplacement entre Tadoussac (800 personnes) et Baie-Ste Catherine (200 personnes) nécessite environ 30 minutes avec les traversiers. Avec un pont à La Boule, ce déplacement prendra le même temps, de plus , les gens du village de B Ste Catherine auront accès plus rapide vers le centre économique de  l’estuaire : la Municipalité de Sacré Cœur sur le Fjord (2000 personnes).  Une communauté dont le dynamisme et le sens de la coopération et de l’entrepreneuriat est  bien connu au pays. Déjà plusieurs entreprises adhèrent à la grappe industrielle que ses citoyens ont créés et l’achèvement de la route par un pont permettrait à la communauté et à la région de prendre un nouvel essor.
  • La perte d’usage de terres agricoles (E18): Le tracé vers la Boule ne traverse pas de terres agricoles exploitées.
  • L’altération de milieux naturel fortement valorisés (E18) : Cette altération, en plaçant le pont à La Boule sera très limitée et moindre que le maintien des traversiers et quais dans l’estuaire.
  • La perturbation du paysage (E18): Au site de La Boule, le pont suspendu, qui sera une infrastructure routière légère et élancée au dessus du fjord, représentera un attrait de premier ordre en lui-même et comme site d’observation. Le pont serait derrière les ligne électrique d’Hydro-Québec et aurait un effet limité sur le paysage vu de l’estuaire (Tadoussac ou Baie-Ste Catherine).

En résumé, l’étude d’opportunité a été biaisée à plusieurs niveaux

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Sur le plan technique 

A- en ajoutant 6.5 km de tunnels au coût de 483M$ (1999) ou 660M$ (2015) alors que l’étude de 1979A et sa mise à jour de 1995 ne font état d’aucun tunnel nécessaire pas plus que  l’étude d’impact de 2009 qui elle élimine tous les tunnels et propose des viaducs vers le site de La Boule (P1).

Pourquoi le MTQ introduit-il 6.5 km de tunnels sur la route vers La Boule et accepte un tunnel de 1.2 km sur le tracé P4 près des traversiers en 1999 , pour ensuite dans l’étude d’impact de 2009, exiger la disparition du tunnel et la construction d’un pont pharaonique qui passerait au-dessus de la montagne en rive sud?

B- en proposant un prix du pont à La Boule surévalué de 60M$ disqualifiant ainsi l’option optimale reconnue dans 2 études indépendantes antérieures (1979A et 1986)

Sur le plan socio-économique

A- En présentant une analyse avantage coûts amputée de plusieurs éléments significatifs dont, sans être exhaustifs, les impacts sur l’économie de la région et du Québec du désenclavement de la région Côte Nord, l’absence des coûts des radoubs de demi vie des traversiers après 20 ans, l’omission des effets des traversiers  sur la sécurité routière dont le syndrome de la traverse décrit par le coroner Dr Arnaud Samson, l’absence ou la sous-évaluation des coûts d’immobilisation des installations terrestres, en proposant des taux d’actualisation de 5% et en appliquant 8% dans le scénario de référence, en investissant 100% des coûts du pont la première année alors qu’on sait que les débours se feront sur plusieurs années, l’analyse avantage-coût ne représente pas la réalité ni une prospective crédible. (E10 à E12)

B- L’omission des effets dissuasifs des traversiers sur la libre circulation des personnes et des biens, l’imprévisibilité et les atteintes à la sécurité routières liés aux nombreux aléas  occasionnés par la présence de traversiers (K53 à K63) dissuade non seulement les touristes , mais les entreprises et les québécois d’échanger avec une région dont l’accès est difficile voire périlleux .De plus, les entreprises qui souhaitent être concurrentielles  sur les marchés continentaux, sont pénalisées par les coûts reliés à la traverse, évalué actuellement à environ $100.00 par déplacement d’un camion remorque. Au-delà des coûts, l’imprévisibilité des déplacements via la traverse de Tadoussac discrédite les entreprises de la région et peut susciter des bris de confiance et des pertes de contrat dans un environnement d’affaire moderne où les livraisons  « Just in time » font loi.

Sur le plan environnemental

Dramatisation des impacts environnementaux sans considération pour les impacts environnementaux actuels des traversiers sur le paysage de l’estuaire avec les quais et les bateaux, sur la protection des bélugas et autres mammifères marins, sur le milieu humain.

Bref, en citant la 2ième phrase de la conclusion (E18)

« La traverse, qui se trouve dans l’axe de la route 138 laquelle longe la rive nord du fleuve Saint Laurent, est en effet le seul lien de transport routier reliant la région de la Côte-Nord directement aux grands centres du Québec que sont Québec et Montréal. Elle revêt donc une importance stratégique et une valeur économique de premier plan pour la région Côte Nord. »

Cette affirmation des auteurs favorise l’option du maintien des traversiers. Cette étude ne contient pourtant pas d’analyse sérieuse des coûts totaux des traversiers à Tadoussac et évite ainsi de comparer la solution du pont avec celle des traversiers.

La version suivante, qui pourrait paraitre toute aussi biaisée, serait pourtant une description plus juste de la réalité:

« La traverse n’est pas un lien de transport routier mais bien une service de bateaux passeurs qui traversent, à intervalles variables et selon l’occurrence de nombreux aléas (météo, glaces, files d’attente, importance des pelotons de sortie, présence de véhicules prioritaires, bris mécanique, grèves du personnel, accidents, radoubs annuels etc.),  la rivière Saguenay avec à son bord les véhicules en attente aux impasses routières de Baie-Ste Catherine et Tadoussac. Cette interruption de la route occasionne de nombreuses atteintes à la fluidité et à la sécurité routière qui tendent, au fil des ans, à dissuader l’utilisation de la route et partant nuisent à l’essor économique de la région desservie. »

Afin de voir plus en détail: